Lettre ouverte au père Krzysztof Charamsa
Cher père Krzysztof,
Ne partez pas!
Les uns ne peuvent être sauvés sans les autres.
Je viens de vivre quelques jours dans un monastère. Là près de mes frères chartreux, votre visage et celui de votre ami étaient très présent dans mon cœur, dans ma prière.
Je me permets donc de vous rejoindre par cette lettre.
Vous arrivera-t-elle?
J'écoute lorsque vous dites que l'Eglise catholique fait vivre un véritable enfer aux personnes homosexuelles.
Oui, je sais qu'il y a dans l'Eglise des personnes très dangereuses pour nous.
Je crois que ces personnes nous parlent plus d'elles plus que de nous!
Une sœur de notre Communion Béthanie me disait à propos d'un évêque : « Il parle de lui en projetant tout cela à l'extérieur. Processus de défense bien connu en psychologie »
Je crois avoir été très clair dans mon livre-témoignage : « Libre. De la honte à la lumière » Presses de la Renaissance 2011, préface de sœur Véronique Margron op.
J'ai exprimé là environ 50%, de ce que j'aurai pu dire...!
Il est urgent que naisse dans nos communautés des espaces d'écoute et de reconnaissance pour toutes les victimes.
Les abus de pouvoir, les « il n'y a qu'à », les « il faut que... » font des ravages considérables.
Depuis plusieurs années, j'essaye d'être à l'écoute de nombreux prêtres homosensibles.
Certains vivent cette réalité dans une certaine paix, d'autres ont quittés le ministère.
D'autres vivent une double, une triple vie...
Loin de moi, l'idée de les juger.
Ma vie me donne de comprendre un peu la complexité d'un chemin humain (cf. le portrait de Jacques dans : « Homosexuels et transgenres, chercheurs de Dieu » Adrien Bail Éditions Nouvelle Cité, septembre 2015).
Il faudra bien, me semble-t-il, que nous sortions de l'impasse, comme le dit, avec la sagesse que nous lui connaissons, notre ami Claude Besson (cf. son ouvrage : « Homosexuels catholiques, sortir de l'impasse » Éditions de l'Atelier)
La sexualité, l'affectivité, les questions d'identité ne sont-elles pas le lieu d'une grande vulnérabilité?
Alors, pourquoi tant de haine, de violence sur ce lieu où nous sommes tous si fragiles et donc si beaux?
Ne partez pas! Restez avec nous!
Modestement, à notre place nous avons à construire l'Eglise.
Si j'ai rencontré des personnes dangereuses dans l'Eglise, je crois avoir rencontré beaucoup plus, de personnes bienveillantes, humbles, paisibles, simplement humaines.
Encore ces jours derniers, ce moine chartreux dont le sourire est un reflet du sourire de Dieu.
Avec lui, en toute simplicité, en profonde vérité, j'ai pu laisser monter, une fois de plus mon cri primal (cf. Jean Vanier) :
« M'aimes-tu?
Suis-je aimable?
Ai-je une valeur? »
J'ai croisé dans son regard la bonté d'un être qui ne juge pas.
Là est la beauté de l'Eglise, la splendeur de l'Eglise.
Une Eglise pauvre pour les pauvres...
Comme le dit si justement ce proverbe oriental : « Avant de juger quelqu'un, mets ses sandales »
Avec vous, cher père Krzysztof, dans votre nouvel état de vie, avec mes sœurs, mes frères, nos ami(es), nos pasteurs, « in fine », cette Eglise que nous aimons, j'aimerais tant être le visage de Jésus.
Ce visage qui est attendu par notre monde, non comme un code de bonne conduite, mais comme une source d'eau vive.
« L'Évangile demeure pour l'Eglise la source vive d'éternelle nouveauté, contre qui veut l'endoctriner en pierres mortes à lancer contre les autres » François, pape.
Priez pour moi, merci.
Jean-Michel+, votre frère prieur de la Communion Béthanie